UMSF : La fusion, c’est compliqueX ! Imprimer
Quelles sont les visées actuelles du pouvoir politique ?
  1. Aiguiser la concurrence pour casser la solidarité entre les établissements et les personnels

La LRU et le passage aux Responsabilités et Compétences Elargies (RCE) ont permis au ministère de mettre en place de nouveaux outils de mise en concurrence au sein du système universitaire. L’appel d’offre « Initiatives d’Excellence » en est une phase exécutive qui permet très officiellement de dessiner une carte de France universitaire à 2 vitesses, séparant les campus d’excellence des autres, ce qui est inacceptable pour les syndicats de l’enseignement supérieur et de la recherche de la FSU.

Au sein de chaque « site », il n’est pas question de construire un projet collectif, mais de donner les rênes à un petit nombre de dirigeants aux dépens de tous les autres, au nom d’une  « excellence » dont on ne sait par qui elle est définie. De ce fait, chacun peut trouver un intérêt semblant collectif au projet. Dans le paysage montpelliérain, tous voient l’excellence à leur porte : la taille et l’histoire de ses Facultés pour l’UM1, le nombre de publications scientifiques, ses riches laboratoires, voire son classement de Shanghaï pour l’UM2, ses liens avec l’économie et la recherche appliquée pour Agropolis. Seule l'UM3, centrée sur les Lettres, Langues, Arts, Sciences Humaines et Sociales, au cœur des discussions initiales sur le Campus, se voit dénier toute place dans une démarche d'excellence, conçue essentiellement en faveur du capital, des banques et de l’industrie.

 

  1. Sortir les universitaires des circuits de décision en mettant en avant quelques mandarins

Le but annoncé est que l’argent des universités ne soit plus géré par le système public mais par un système privé. Ce n’est pas simple à faire passer. Dans certains pays, la dotation en capital, financier ou foncier, remonte au Moyen-Âge. Et le gouvernement n’a pas les moyens de mobiliser l’argent nécessaire. Mais il veut au moins réussir à mettre en place une organisation qui verrait les finances des universités gérées par des structures, privées, qui pourrait s’appeler « Fondations » ou « Associations ». C’est le principal danger de la période en cours. Ces fondations telles que les conçoit le Gouvernement sont des structures financières qui échappent aux universitaires. Et si les universitaires perdent le contrôle des finances, assuré à l’heure actuelle par le service public, la transformation pourrait devenir irréversible.

Malheureusement, quelques collègues se verraient bien participer au mécanisme, illusionnés ou plus simplement intéressés. Aussi nous assistons à diverses propositions basées soit sur un PRES, soit sur un grand établissement, chacun adossé à une fondation. Dans un cas, tout est verrouillé par la LRU, dans l’autre, les statuts sans cadre ministériel précis comme c’est le cas pour une université, sont à définir dans les grandes lignes avant la fin de l’année et à finaliser d’ici juin 2011. Les questionnements et les inquiétudes des personnels et des étudiants sont immédiats et justifiés. Libéralisation des droits d’inscription ? Regroupement des écoles d’ingénieurs et masters « d’excellence » vers un collegium hors des universités, associant probablement les IUT, créant ainsi un collège universitaire pour le L ? Devenir des laboratoires hors Labex ?

 

  1. Rendre Montpellier « monocolore » sur la carte de France des Universités

L'appel du ministère comporte de nombreux « produits », dont les « Labex (laboratoires d'excellence) » et les « Equipex (équipements d’excellence) ». Pour construire un laboratoire d'excellence, fort d'au moins 400 chercheurs et enseignants-chercheurs, il n'est à l’heure actuelle pas question de projets scientifiques sainement construits, mais de mots-clés à la mode comme la trans-disciplinarité érigée en principe incontournable. Il est surtout question de ramener tout l’argent collectif et les Equipex sur les équipes estampillée A+ par l'AERES (les équipes évaluées A sont au mieux tolérées).

L'objectif officiel du ministère est d’associer une thématique unique à chaque site universitaire et surtout que la communauté fasse elle-même le ménage, un peu comme dans la révolution mexicaine où l’on creusait sa tombe avant d’être fusillé. Une fois ce thème de l'initiative d'excellence établi – et à Montpellier, ce sera « l'homme et son environnement » – des disciplines scientifiques entières se retrouvent exclues de toute participation, et se retrouveront asséchées lorsque l'université et les EPST décideront d’obéir au gouvernement et de concentrer leurs financements uniquement sur les équipes motrices des Labex réunis dans l’Idex. Les déçus seront nombreux : tous les Labex ne seront pas approuvés par le ministère. Il est vrai que pour une fois, il pourrait y avoir quelques satisfaits. Exactement comme pour les primes individuelles.

Mais il s’agit là du discours d’une ministre que nous avons appris à ne pas croire. Si l’on regarde de près les choix du gouvernement dans son ensemble, on observe un recentrage des financements sur Saclay et Paris. Évidemment, ce n’est pas politiquement tenable : il faut un écran de fumée. Ce recentrage des grandes villes par thème permet aussi de donner aux universitaires et élus locaux des os à ronger.

 

Quels sont les enjeux actuels de la discussion et dans quel sens devons-nous intervenir ?

A l’heure actuelle, les universités françaises restent un lieu où il existe une excellente recherche, caractérisée par un rapport qualité-prix exceptionnel. Cette recherche permet un enseignement de qualité, délivrant des diplômes ayant une vraie reconnaissance sur le marché du travail (à l’exception notable des thèses, mais la responsabilité n’en incombe-t-elle pas au patronat français, en retard d’une guerre ?). Cette « université » irrigue l’ensemble du territoire et si elle souffre d’inégalités sociales, n’est pas totalement interdite aux couches les plus pauvres de la population.

Ses principaux handicaps sont de l’ordre du bâti : à la fois pour l’enseignement et la recherche et pour le logement étudiant. La disparité des moyens est aussi considérable entre disciplines, surtout si l’on compare à la « concurrence » internationale.

Aucune des propositions actuelles du gouvernement ne résout un seul de ces problèmes. Et les apports d’argent promis pourraient être investis sans que cela nécessite un changement structurel. Mais, alors, pourquoi s’attaquer à l’essence de la démocratie universitaire ou au système public de financement et de contrôle financier ?

Il faut donc veiller à ne pas confondre la proie et l’ombre. Oui, les investissements peuvent être acceptés. Non, ils ne doivent en rien compromettre les traditions de la démocratie universitaire et de la République.

On peut et on doit garder cette idée en tête en analysant chaque proposition. Et ce d’autant plus qu’on peut commencer à considérer que ce pouvoir est en train d’être rejeté. Toutes ces réformes impopulaires et efficaces seulement pour un petit groupe de grands financiers, seront remises en cause assez rapidement. Il ne faut céder sur rien..

Les négociations actuelles se déroulent hors des conseils et des lieux de démocratie de nos universités. La précipitation et le bricolage prédominent et ignorent souvent les instances élues.

 

Le SNASUB, le SNCS et le SNESUP,

- dénoncent la politique irresponsable du ministère, qui vise à :

  • Décupler les inégalités entre universités ;
  • Privilégier l’injection d’argent sur des projets à court terme, centrés sur des partenariats à court terme avec l’économie locale, au lieu de considérer l’enseignement supérieur et la recherche comme des investissements pour l’avenir ;
  • Attiser les guerres locales et disciplinaires, pour que la sélection se fasse d’elle-même.

- défendent des principes simples et clairs :

  • Défendre toutes les missions fondamentales de notre service public ;
  • Construire un campus pluriel, où les qualités de chacun sont reconnues de manière équilibrée ;
  • Décider collégialement, au sein des conseils centraux, des grandes orientations et de la répartition des moyens, les structures de formation et de recherche les plus reconnues jouant alors le rôle de locomotive au lieu de faire sécession.

C’est en ce sens que les sections de Montpellier du SNASUB, du SNCS et du SNESUP agiront pour faire connaître et partager leurs analyses des projets d’Idex et leurs propositions sur la base de nos convictions.

Syndicat National de l'Administration Scolaire Universitaire et des Bibliothèques SNASUB-FSU (Montpellier)
Syndicat National des Chercheurs Scientifiques SNCS-FSU (section de Montpellier)
Syndicat National de l’Enseignement Supérieur SNESUP-FSU (sections UM1, Campus-UM2, IUFM, IUT, UM3)